Sur le papier, Le Bon Bock est le genre de restaurant dont les Montmartrois ont tendance à se méfier. Officiellement estampillé « plus ancien restaurant de la butte », on pourrait imaginer qu’il s’agit encore d’un énième attrape-touristes. Bien que ça n’ait jamais réellement été le cas, disons qu’il fallait connaitre pour oser s’y aventurer. Aujourd’hui, ce serait carrément dommage de passer à côté.
Ouvert par Charles Moreux en 1879 sous le nom de Brasserie du Plus Grand Bock, l’établissement faisait partie de ces petits caboulots où se réunissaient les artisans des environs mais également les artistes, parmi lesquels, dit-on, Toulouse-Lautrec, Steinlen, Apollinaire ou encore Picasso. La décoration du lieu était très simple, si ce n’est les nombreuses peintures placées le long des murs, souvent laissées par les artistes pour payer l’addition. Dans le livre « Raphaël et Gambrinus ou l’art de la brasserie » paru en 1886 (John Grand-Carteret), on peut lire que c’est sur ces murs que trônait « la fameuse Femme au Bock d’André Gill, tenant une chope de bière mousseuse sur ses seins tendus, le corps rejeté en arrière. » Durant près d’un siècle et demi, on y a servi une cuisine simple et familiale. Racheté après-guerre par un certain Baldi, l’établissement a longtemps été tenu par Madeleine Guérin, figure montmartroise et amie de Michou, puis par ses enfants après son décès accidentel en 2018.
Repris au printemps 2025 par l’ancienne équipe du Petit Bouillon Pharamond, Le Bon Bock semble avoir conservé son décor d’origine, offrant une véritable immersion dans l’atmosphère de la Belle Époque. Ses murs toujours ornés de tableaux, son vieux comptoir, ses lumières tamisées et son piano d’époque légèrement désaccordé dans la salle du fond recréent l’ambiance des soirées d’autrefois.
Mais c’est clairement dans l’assiette que se trouve la plus belle surprise. La carte met en avant une cuisine traditionnelle française revisitée juste ce qu’il faut à la sauce XXIe siècle par le chef Salim Soilah. Au menu, les cuisses de grenouilles en persillade se disputent les faveurs des escargots de Bourgogne, de l’os à moelle (magnifique) ou de l’oeuf en meurette (parfait), le médaillon de joue de boeuf (divin) celles du magret de canard sauce Suzette (incroyable) et en dessert, la mousse au chocolat Valhorona (exceptionnelle) celles de la poire pochée et de la crème brûlée. Et c’est vraiment, mais vraiment très bon.
Rajoutez à cela une équipe ultra sympathique, une playlist 100 % française complètement raccord avec le décor, et des prix carrément honnêtes comparativement à ceux (trop) souvent pratiqués dans le quartier, et vous aurez trouvé le combo parfait pour passer une vraie belle soirée à Montmartre. En s’offrant une seconde jeunesse, Le Bon Bock devient une pépite a (re)découvrir d’urgence ; notre coup de coeur de la rentrée.
📍 2, rue Dancourt Paris 18
Ouvert du mercredi au vendredi de 18h30 à 23h30, le week-end de 12h à 23h30

