Le Bouclard est une adresse de connaisseurs, le genre d’endroit où l’on peut arriver par hasard si un ami bien intentionné ne nous en n’a pas déjà vanté les mérites, mais dont quoi qu’il arrive on se souvient très longtemps, pour peu qu’on soit amateur de bonne chère et bon vivant.
C’est dans la discrète rue Cavalotti, au pied de la Butte Montmartre et à deux pas de la Place Clichy, que Michel Bonnemort a ouvert son restaurant il y a presque trente ans. Comment ne pas succomber au charme de ce truculent personnage qui, comme il le dit lui-même, « a eu une vie comme le gruyère, pleine de trous ! ». S’il manie la métaphore culinaire comme personne, c’est qu’il a de bonnes raisons, et dire qu’il est tombé dans la marmite quand il était petit n’est pas exagéré.
Rosalie, son arrière-grand-mère paternelle, était une cuisinière hors-pair, et Michel a toujours gardé en bouche le goût de sa confiture de tomates vertes et de son poulet. René, son grand-père maternel, dirigeait quant à lui Le Cochon d’Or dans le 19e, « le seul restaurant de La Villette pour lequel se déplaçait le tout-Paris ». Il aura pourtant fallu attendre plusieurs années avant que Michel ne se décide à marcher dans les pas de sa famille.
D’abord kinésithérapeute et prof de judo, Michel a longtemps vécu aux États-Unis. A New-York, il travaille en tant qu’ostéopathe dans un centre qui accueille de nombreux artistes et y fait de belles rencontres, puis il intègre le Culinary Institute of America avant de se lancer dans l’import-export de produits hôteliers et de faire rayonner la gastronomie française aux States pour le compte d’une grosse agence de communication. Il y a une trentaine d’années, il rentre en France, et rattrapé par l’atavisme familial, il décide d’ouvrir un restaurant.
Au 1 rue Cavalotti, il déniche un lieu en piteux état, ancienne Brasserie des Studios, pour y ouvrir « son » Bouclard. Il en fait un lieu typiquement parisien, où trône un superbe bar réalisé sur-mesure, pièce maîtresse de la maison. Côté cuisine, Michel élabore des recettes héritées de ses aïeux dans la pure lignée de la gastronomie française, et n’attend pas que cela devienne un argument de communication pour cuisiner les produits de saison. Depuis toujours, la carte change quatre fois par an, même si on retrouve toute l’année les incontournables : le gratin de queues d’écrevisses, le foie gras maison, le magret de canard, sans oublier le fameux poulet Rosalie, ou encore le pastrami dont Michel a fait sa spécialité, héritage de ses années new-yorkaises.
Le Bouclard, c’est une cuisine extraordinaire, mais c’est aussi une ambiance à nulle autre pareille, et il n’est pas rare d’y croiser quelques célébrités aussi discrètes qu’épicuriennes. La proximité de plusieurs studios de tournage et de maisons de disques en a été l’une des raisons premières, la personnalité de Michel et la qualité du restaurant ont suffi à faire le reste. Feuilleter le livre d’or du Bouclard, c’est comme consulter le bottin mondain : la famille Cassel/Bellucci a fait partie des fidèles, Jean Schultheis est devenu un véritable ami, Mel Gibson s’y est régalé, et Sandrine Bonnaire en a fait sa table préférée. Il faut dire que Michel a le sens de la fête, et qu’il n’est pas rare de le voir sortir une bonne bouteille pour trinquer avec les clients.
Michel nous a confié que plusieurs rencontres successives avaient été déterminantes dans l’histoire du restaurant. Celle avec Jacqueline Gili en fait incontestablement partie. Depuis 2005, c’est elle qui dirige le lieu avec autant de charme que de professionnalisme, et qui est même à l’origine de la fameuse mousse au chocolat sans beurre ni jaune d’œuf ni sucre ; un vrai délice ! Et comme Michel est aussi un homme fidèle, il a nommé chef de cuisine Alex Marnet, l’un de ses anciens apprentis passé par Mederic et Ferrandi après avoir démarré comme plongeur au Bouclard en 2010.
Bien qu’il ait raccroché les gants en cuisine, Michel Bonnemort continue d’insuffler sa joie de vivre au Bouclard, et reste plus déterminé que jamais à faire parler de son restaurant. Il faut dire qu’il est resté un excellent communiquant, comme en témoigne son « Bouclard Times » ou les nombreux articles de presse qui lui sont toujours consacrés.
Alors voilà, pour qui souhaitent vivre une expérience gastronomique unique et chaleureuse, Le Bouclard est sans aucun doute l’adresse la plus authentique du quartier ; désolés pour ceux qui avaient l’intention de se mettre au régime !
Crédit photos : Baptiste Allard (sauf mention contraire)
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